Le jour où Brahim a ressenti un « coup de foudre »
C’était un vendredi. Il faisait moins chaud en ce mois d’octobre. Les invités commençaient à venir les uns après les autres. À peine sur le lieu, Brahim s’est isolé à l’écart des installations. Son appareil photo en main. Il revivait son feuilleton passé tout à l’heure sur la chaîne Novelas. Un film qui relatait l’histoire d’une très belle fille riche tombée amoureuse de son jardinier. Le dernier épisode s’est arrêté au moment où la fille riche embrassait tendrement son homme.
La belle histoire faisait rire mais aussi réfléchir Brahim : « Imaginez, une belle et riche fille de ce pays qui tombe amoureuse de son jardinier. Non, c’est irréel au Tchad », se dit-il dans sa tête. Rien que pour avoir eu cette pensée dans l’esprit, la trentenaire en rit. « Ici, les filles traquent des hommes aux ‘comptes bancaires’ garnis et aux grosses cylindrées. Un jeu qui met beaucoup d’hommes pauvres au sentiment sincère au banc de touche », poursuit le photographe.
« Qui est cette créature à la beauté envoûtante ? D’où vient-elle ? Est-elle une terrienne ? »
Subitement, une voix l’interpelle et met fin à ses imaginations débordantes. « Brahim, les mariés arrivent ! » Aussitôt, le garçon se met en place. La cérémonie démarre. Le photographe se lance, multiplie ses prises. Les images sont de plus en plus fantastiques. Après trente minutes de travail intense, quelque chose retarde les prises de Brahim. Son index reste suspendu, son œil collé au viseur de l’appareil.
Brahim est hypnotisé par une inconnue. Il est littéralement subjugué par sa beauté. Son cœur se met à battre lentement. Son esprit est figé sur cette femme dans l’assistance. Qui est cette créature à la beauté envoûtante ? D’où vient-elle ? Est-elle une terrienne ? Des questions qui submergent le photographe. La femme se cache dans une robe bleue assortie avec tout ce qui va avec. Son visage est dessiné par une petite bouche sculptée avec délicatesse qui met en avant un nez pointu. Impossible de ne pas la regarder.
Finalement, Brahim se reprend. Son travail de photographe de la cérémonie peut alors se poursuivre. Deux heures sont écoulées. Enfin, le mariage prend fin. Aussitôt, Brahim remet la carte mémoire à sa patronne. Il ne pouvait pas s’opposer même s’il voulait garder une photo souvenir de la belle dame. Il lui est impossible de faire la copie de la carte. Car le couple embarque illico pour Paris. Brahim se retrouve les mains vides. Impuissant, il regarde disparaitre ces images qui lui auraient servi forcément d’alibi pour approcher sa déesse.
Mains vides, regard orienté sur les sièges désertés par les hôtes, Brahim replonge dans son feuilleton. Dans le réel, le scénario est un peu modifié cette fois-ci. Il ne relate plus l’histoire de la belle et riche fille amoureuse de son jardinier, mais celle d’un photographe tombé sous le charme d’une inconnue, belle et raffinée. Brahim n’a pas d’autre choix : il repart en transpirant chaudement.